« Nous demandons l’obtention des vignettes Crit’Air 1 pour les biocarburants », Alexis Gibergues
13 avril 2022
Le filtrage des camions par leur niveau de pollution dans les ZFE va de pair avec une réglementation de plus en plus contraignante sur les livraisons. Le président de l’OTRE exprime les demandes des transporteurs dans une interview de Transport Info.
Transport Info: Vous regrettez la manière dont les ZFE sont déployées, pourquoi?
Alexis Gibergues: On peut déjà regretter la disparité des règles entre les 45 territoires en France et même au niveau européen où il y en a 247. Est-on vraiment sur un marché unique avec des règles de concurrence identiques pour tous ? L’autre point, c’est de mettre la sanction avant l’incitation. Pour que le désengagement vis-à-vis du pétrole s’opère de manière efficace et dans le respect du marché et des entreprises, il faut l’accompagner par des aides au financement. Avec de récentes annonces, le gouvernement prend ce chemin, mais à rebours, un peu dans le désordre.
On fixe un calendrier et puis, en ordre disparate, on essaie de trouver des solutions pour accompagner ce calendrier. Ce n’est pas la bonne démarche, il aurait fallu faire l’inverse. La mise en œuvre des ZFE dans les agglomérations concernées impose trois points indissociables : un diagnostic précis préalable, une concertation avec l’ensemble des acteurs et la prise en compte des travaux de la task force avec l’État (transporteurs, constructeurs et énergéticiens.).
TI: Dans les métropoles, existe-t-il des instances de dialogue entre les transporteurs et les élus au sujet des ZFE?
AG: Il y a le programme InTerLUD qui est très intéressant et qui doit perdurer pour accompagner la profession et faire entendre ses spécificités auprès des collectivités territoriales notamment. Nos entités territoriales, à chaque fois, prennent attache avec les collectivités locales, pour voir comment les ZFE s’organisent. Il y a une grande disparité dans la méthode.
À Toulouse par exemple, il y a des avancées, des contacts avec les élus, avec les différentes communes, un peu à l’image de la démarche de la Métropole du Grand Paris. À Strasbourg, en revanche, c’est plus unilatéral.
TI: Au niveau du Grand Paris, comment se déroule le dialogue?
AG: Il est important de mettre en exergue les professionnels qui doivent avoir une capacité de desserte dans le Grand Paris qui soit distincte des enjeux liés aux particuliers.
Au-delà de la ZFE, nous interpellons nos élus sur les accès pour les stationnements, les aires de livraison, c’est encore plus le cas pour Paris intra-muros. Étant à la tête d’une entreprise de déménagement, je peux témoigner de l’enfer vécu pour accéder aux portes de Paris avant de pouvoir se garer. Il faut prévoir une heure de temps supplémentaire en moyenne.
TI: Quelles sont vos solutions pour faciliter la transition énergétique?
AG: L’OTRE et ses adhérents sont très engagés dans la transition énergétique qui nécessite des investissements longs et massifs. Aujourd’hui, nous percevons une grande difficulté pour opérer cette transition de manière rationnelle. En tant que TPE et PME du transport routier, nous sommes aussi dans l’urgence. On ne peut pas se projeter à 10, 15, 20 ans sans aides immédiates.
À commencer par des allégements de charges sur la fiscalité du carburant qui permettent aux entreprises de survivre, parce que c’est ça l’enjeu. La crise ukrainienne et les bouleversements économiques qu’elle engendre pour les semaines à venir mettent en avant cette problématique.
Nous pensons que la clé passe par le mix énergétique et non pas par la seule solution électrique. Voilà pourquoi nous demandons l’obtention des vignettes Crit’Air 1 pour les biocarburants, B100 ou XTL, dès lors que le véhicule est à usage exclusif et irréversible. Il s’agit là de carburant de transition dans l’attente du développement, notamment des filières électriques et hydrogène.