« Penser que la seule solution à envisager est une taxe me gêne », Jean-Marc Rivéra
08 juin 2021
Le délégué général de l’OTRE, réagit à l’adoption de l’ordonnance permettant de taxer les poids lourds en Alsace dans le dernier numéro de l’Officiel des Transporteurs.
Pour rappel sur la loi Climat et Résilience qui entend généraliser la disposition Alsacienne à l’ensemble des régions, la position de l’OTRE est claire : s’opposer par tous les moyens à toutes les mesures qui visent à taxer encore plus les entreprises du transport routier. C’est ce qu’elle fait actuellement en agissant auprès des Sénateurs pour démontrer toutes les incohérences et les impacts des mesures envisagées dans le projet de loi.
Un combat long s’annonce et il ne se limitera pas à l’adoption de la loi.
L’Officiel des transporteurs : Qu’est-ce qui vous déplaît dans la philosophie de cette écotaxe alsacienne ?
Jean-Marc Rivéra : On savait que cette échéance allait arriver. Ce qui nous inquiète, c’est qu’on voit un projet de loi Climat qui va, avec son article 32, généraliser ce qui pourrait se passer en Alsace à toutes les régions qui le souhaiteraient. On ne sait pas clairement quels sont les objectifs. On voit l’idée de départ alsacienne, qui est de dire qu’on a beaucoup de véhicules en transit sur l’axe français parallèle à la voie allemande et que comme les PL ne veulent pas payer en Allemagne, ils passent par nos routes. Donc il faut taxer cette route pour que les véhicules reviennent sur le réseau allemand. Or, peut-on dire que la taxation va aboutir à ce résultat ? En Belgique, les chiffres montrent que sur les routes écotaxées il y a 2 ans, le trafic poids-lourd a augmenté de 6 %. Le second point, c’est de savoir quels vont être les effets sur l’activité régionale : ce n’est pas quantifié et ça nous dérange !
Il semblerait que vous regardiez avec attention une initiative dans le Gers pour réduire le trafic des poids lourds…
J-M. R. : Le département avait, sur une large période, contrôlé les feuilles de route des véhicules et il s’est aperçu qu’il y avait du transit mais aussi de l’activité locale ou de longue distance servant à la desserte locale. Il a vu qu’en taxant, c’est l’économie locale qui serait impactée. Il a donc été convenu d’opter pour des arrêtés d’interdiction de circulation sauf desserte locale. L’effet a été immédiat : il y a un outil pour contrôler que le véhicule est là pour des raisons valables et si ce n’est pas le cas, il y a verbalisation. Ce qui me gêne, c’est que la seule solution à envisager soit une taxe. Je n’ai pas de difficulté à dire que si un véhicule est en transit, il doit utiliser les réseaux adaptés, quitte à en payer le coût, car la congestion routière nous est nuisible à nous aussi dans les zones denses. Mais nous souhaitons que l’on mette en place des réponses adaptées.
Envisagez-vous de vous mobiliser pour que cette mesure ne s’applique pas ?
J.-M. R. : L’heure n’est pas à la mobilisation. Nous prônons une suppression pure et simple de l’article 32. On pourrait s’imaginer que, une fois la loi votée, les ordonnances seraient du même calibre que celle prise en Alsace. On va regarder de très près car l’ordonnance doit se mettre en place avec la consultation des organisations professionnelles. Ce sera à nous de pointer les incohérences et de s’opposer notamment sur l’aspect juridique. Si à la fin il faut le dire différemment, pourquoi pas. On n’en est pas là, j’espère que certains reviendront à la raison…